Sunday, June 3, 2012

Sauve qui peut ! ...

Des «Indignés» grecs***
D’un côté : la famille, le pays, la culture, le chômage, l’absence de perspectives. De l’autre : la solitude, le déracinement, l’emploi, la carrière, un salaire décent.
Quelle vie pour quel avenir ? Voilà les questionnements de la jeune génération grecque. Ils sont jeunes, ils ont la vie devant eux, des ambitions, des idées, la volonté de s’en sortir. Ils sont de plus en plus nombreux à faire le choix de quitter leur pays , non par réelle envie, mais par nécessité. 

Ce phénomène n'est pas mineur ou secondaire ; tous les jours, je rencontre et discute avec de nouveaux jeunes qui veulent s'en aller vivre à l'étranger, eux aussi.
En même temps, que peut-on espérer d’un pays où le taux de chômage atteint les 22% (un chiffre qui a quasiment doublé en deux ans, depuis le début de la crise de la dette), celui des 15-24 ans dépassant les 50% (chiffres de l'Autorité des statistiques grecques) ; où les diplômes deviennent inutiles par manque d’emplois qualifiés ; où les chances de lancer une carrière sont quasiment impossibles (gel des embauches dans la fonction publique notamment) ; où il est devenu difficile de quitter le domicile familial en raison des dégâts de la crise économique au sein des foyers ; où ces mêmes familles n’ont plus toujours l’argent pour envoyer leur progéniture dans une grande ville pour qu’elle puisse étudier ; où l’on parle des jeunes comme d’une «génération perdue» (en écho à celle de l’entre-deux-guerres). 

Panagiotis,  440 euros par mois : «riche comparé à d’autres»

Panagiotis – alias Panos – a 25 ans, cela fait quatre mois qu’il a pris la décision de quitter Thessalonique pour Londres. S’il a choisi cette destination, c’est d’abord pour des raisons linguistiques – il parle anglais – mais aussi parce qu’il existe là-bas de bonnes universités et que les salaires sont relativement élevés. En plus de ça, il connaît du monde sur place, et ne sera donc pas totalement seul. Depuis près d’un mois, il a accepté un petit boulot pour mettre de l’argent de côté et anticiper son départ à la fin de l’été. Il m’explique qu’avant la crise, il occupait un emploi qui lui plaisait, au sein du département financier d’une grande entreprise. Il s’imaginait qu’il aurait pu y évoluer et y passer le reste de sa vie. Mais au retour de son service militaire, en 2011, la crise s’était installée au sein de l’entreprise, entraînant la dynamique des plans sociaux. S’il n’était pas pour l’instant sur la liste des nouveaux chômeurs, il avait cependant dû changer de poste et était devenu vendeur. Pour limiter les licenciements, son temps de travail avait également été réduit, et, au lieu de ses huit heures quotidiennes, Panagiotis n’avait d’autre choix que d’accepter de ne plus travailler que quatre heures. Son salaire était ainsi passé de 800 à 440 euros par mois. «Mais tu sais quoi, me dit-il avec un petit rire jaune, j’étais riche comparé à d’autres.»  Ces «autres» qui, contrairement à lui, n’ont pas la chance d’être hébergés et nourris par leurs parents.
A Londres, Panagiotis souhaite continuer ses études. En Grèce, il existe deux filières universitaires distinctes et la branche technologique dans laquelle il a étudié est considérée comme inférieure, tout comme le diplôme qui en résulte. Les masters qui lui sont accessibles sont donc peu nombreux, difficiles d’accès, payants pour la plupart, parfois très chers. «Mais après le master, qu’est-ce qui m’attend ? Londres m’offrira plus d’opportunités de trouver un job. Je ne vais pas là-bas pour travailler à McDo. Mon ambition est juste d’exercer un métier que j’aime.»
Panagiotis a de la chance, tout le monde n’a pas forcément les moyens financiers nécessaires pour émigrer vers l’étranger afin d’y continuer ses études. Celles-ci coûtent cher, tout comme la vie dans de grandes villes telles Londres, Stockholm, Berlin. 

Le père et le fils en Angleterre, la mère et la fille en Grèce

Le phénomène d’émigration ne touche pas seulement les jeunes ;  de plus en plus de familles entières repartent sur les routes, comme leurs prédécesseurs dans les années 50-60. Les destinations les plus prisées sont les pays d'Europe de l’Ouest (dont la Suisse, le Royaume-Uni, l’Allemagne), les pays scandinaves, ou encore les Etats Unis, le Canada, l’Australie, voire les pays de l’Amérique latine qui connaissent une forte croissance économique comme le Brésil.
Généralement, l’un des membres s’en va en premier, un visa touristique ou temporaire en poche - lorsqu’il s’agit d’un pays extérieur à l’Union européenne, afin de rechercher des contacts, des soutiens ou un job, voire de parvenir à l’obtention d’un visa permanent. C’est ensuite que sa famille vient le rejoindre, si elle le peut. Ma colocataire me raconte que la famille d’un de ses meilleurs amis s’est totalement scindée en deux : le père et le fils sont partis en Angleterre tandis que la mère et la fille sont restées en Grèce pour s’occuper du commerce qu’ils possèdent toujours à Athènes. 
Pour d’autres familles, il n’y a plus aucune attache en Grèce, si ce ne sont les proches. C’est le cas d’Alex et sa famille. Ce grand brun souriant aux cheveux longs bouclés m’affirme qu’il n’a plus rien à faire en Grèce, qu’il n’a plus rien à perdre. Au chômage depuis quatre ans, il me raconte qu’il ne perçoit aucune aide de l’État et que pour nourrir leurs deux filles de 6 et 3 ans, lui et sa femme doivent compter sur le soutien de leurs familles respectives qui payent leurs charges liées au logement et qui leur fournissent de quoi vivre. « À 45 ans, je ne me sens pas fier d’être nourri par mes proches… J’espère que ma nouvelle vie me permettra de les aider à mon tour.» Aux yeux d’Alex, l’émigration reste le seul espoir de s’en sortir. «Je veux juste un emploi, avoir la chance de vivre décemment et de nourrir ma famille.» Celle-ci a choisi l’Australie pour destination car le pays est en dehors de l’Europe et Alex est convaincu que la situation qui touche actuellement la Grèce se répandra bientôt à toute la zone euro. «Si l’on souhaite immigrer là-bas, c’est avant tout pour nos enfants, pour leur offrir la chance de vivre une vie meilleure que celle qui les attend ici.»
Pour parvenir à s’insérer en Australie - où la législation concernant l’immigration est l’une des plus strictes du monde, les démarches sont longues et laborieuses -  la famille a des amis sur place qui tentent de les aider. Alex m’explique que depuis plusieurs mois se développent des escroqueries sur Internet visant à soutirer des informations bancaires ou de l’argent aux futurs migrants en prétendant leur offrir un emploi ainsi qu’une entrée légale dans le pays.
Ainsi fuient aussi les cerveaux.
Pendant ce temps, les pays en dehors de la zone euro commencent à redouter une éventuelle faillite de la Grèce et une augmentation du flux des immigrations. Certains comme le Royaume-Uni réfléchissent déjà à une façon de se prémunir contre d’importants mouvements[EN*], [GR*] potentiels de personnes en recherche d’avenir à l’étranger. 

Le «retour à la terre», ou l'exode rural à l'envers

Un nouveau phénomène de déplacement des populations apparaît également : les migrations internes. Après l’exode rural des cinquante dernières années, on assiste au phénomène inverse, le retour à la terre. Les familles qui ne possèdent plus rien en ville (travail, argent) la quittent pour retrouver leur village d’origine. Les prix y sont moins élevés, ils y développent des cultures différentes de celles du passé. Selon les résultats d'une étude réalisée par l'institut de sondage Kapa research, 1,5 million de Grecs envisageraient de retourner vivre en province.

Régime spartiate

http://grece.blogs.liberation.fr


 ***Des «Indignés» grecs couvrant leurs oreilles, leurs bouches ou leurs yeux sur la place Syntagma d'Athènes située en face du parlement grec, le 15 octobre 2011. (Louisa Gouliamaki/AFP/Getty Images)
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[GR*] :  Υψώνει τείχος η Βρετανία στους Έλληνες μετανάστες!

[EN*]: May pledges to stop Greek migrants flooding into Britain if they are forced to pull out of the Euro

 

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